Sous un soleil enfin présent, Agata et moi rallions tranquillement le village pittoresque de Sâou. L’objectif est rapidement en vue, visible du parking : c’est qu’elle en jette cette ligne qui louvoie dans les dévers ! Nomade’s land s’insinue en effet astucieusement de part et d’autre des gros dévers marrons et propose de belles envolées de V sup à 6b.
Après un petit échauffement par la courte et raide marge d’approche, c’est moi qui ouvre le bal. Et il faut avouer que ce 6b à l’échauffe pique un peu ! Je m’emmêle en effet un peu dans les méthodes et ne vais pas au plus simple. Agatha galérera, elle aussi, a trouvé les bons placements, s’octroyant quelques stops dans cette longueur pas facile.
Elle reste cependant motivée, déterminée même, à poursuivre le réversible. Aussi part-elle à l’assaut de la 2e longueur, 6b également, avec, il est vrai, quelques appréhensions… Mais elle avance. Et bientôt, se retrouve sous un petit bombé qui lui oppose résistance. Malgré un équipement irréprochable en broches sellées, elle hésite, tergiverse et craint de monter au-dessus du dernier point. Je la motive, lui rappelant qu’elle est venue pour se mettre au défi et essayer de réaliser cette voie en réversible, qu’elle en a le niveau. Place donc à l’audace : vas-y, tentes ! Elle essaye. Mais chute. Si ce n’est pas toujours aisé en grande voie, ça le mérite de la rassurer et de la détendre un peu !! Alors que les Mirages 2000 remplacement soudain les vautours dans le ciel, elle retente. Après quelques vols, plutôt que de la redescendre au relais, je lui propose d’artificier le pas et lui explique comment faire (pédale). Elle tente mais finit de nouveau dans les cordes : c’est qu’il lui manque quelques décimètres pour atteindre la paire ! Aussi finit elle par me rejoindre à R1. Je rempile donc pour ouvrir cette 2e longueur et comprends ses hésitations car il s’agissait d’oser partir à gauche (chose que je lui avais déconseillé, gloups !!) et de monter bien au niveau du point avant de le clipper. La suite est plus déroulante jusqu’au pied du gros dévers. Agata y réussira bien mieux en seconde: ah, ce moral, il faut sans cesse le travailler !
Elle reprend la suite des opérations menant comme une chef les 2 longueurs de V sup qui suivent, en continuelle ascendance à droite, dans un joli rocher gréseux à prises franches. C’est une partie très agréable, déroulante, que nous parcourons vite.
Puis je reprends le lead pour la 5e langueur, un 6b de nouveau. Il s’agit d’une très belle traversée aérienne horizontale sur silex avant de partir en ascendance puis droit avec un petit pas au réta. Je ne fais pas le mariole et subis un peu cette longueur, bien technique à pied avec de l’ambiance au programme. Agata suivra, requinquée de ses émotions mais un chouïa émoussée par l’ambiance. Elle prendra le temps de travailler le pas dur dans la section verticale puis me rejoindra à l’exigu R5. Et oui, en grande voie, promiscuité garantie !
Puis elle reprend la tête de la cordée pour une longueur aérienne allant chercher un dièdre en rocher moyen. D’ailleurs, pas manque: à peine les premiers pas réalisés, elle casse une prise ! C’est ça d’être pétée de force ! Ou plutôt un rappel qu’il faut toujours rester vigilant en grande voie, à Saou plus qu’ailleurs, ce même après des gros travaux de purge. Elle repart donc un genou coloré et les mains de même, laissant partout où elle passe des traces écarlates… Rien de grave mais le terrain est désormais balisé ! Je suivrai un peu en peine dans cette longueur pourtant pas si dure (6a) mais assez malcommode et peu agréable, probablement la moins belle de la voie.
L7, a contrario, nous offre une belle occasion de découvrir toute la panoplie des poupées de silex que recèle cette paroi. Un court V sup fort agréable que l’on avale fissa.
Puis, en L8, place pour Agata à un magnifique dièdre soutenu, fissuré, raide. Elle hésite, mais se motive et part en tête, s’attendant à un petit combat. Elle grimpera cette pitch avec un style renfougne assez marqué, méthode peu orthodoxe mais efficace. Bien ouèj Agata 😊 Je ferai un peu la même en second, un peu plus en écarts.
Puis j’en termine avec la petite dernière, L9, avec moult fissures à verrous de main. J’y dégote même un genou ! Bref, toute une panoplie gestuelle que l’on ne s’attend pas à trouver en grande voie, encore moins après avoir parcouru des murs à silex verticaux, mais qui a toute sa place ici. Pour le plus grand bonheur du répertoire gestuel d’Agata, heureuse tout de même d’en terminer, les pieds douloureux (belle chaleur ce jour).
On peut alors profiter d’une vue panoramique superbe, voyant très bien le joli petit village de Saou en contrebas, le rocher de la Graville et son camping, les sommets vallonnés de Bourdeaux, les cultures colorées de cette fin de printemps humide. Bref, un vrai sommet pointu itou !
Puis place aux rappels. Le premier est court, simple, efficace : 25m jusqu’à R8. Après avoir vérifié l’aisance d’Agata dans ces manips, j’ouvre le bal, puis l’accueille juste en dessous. Puis c’est ensuite un beau rappel de 50m. Idem, je l’ouvre et Agata me suit promptement. Mais là, patatras : la corde noire ne veut pas revenir ! On a beau s’excentrer du relais, tirer, mettre des à-coups, donner du mou, forcer, rien n’y fait, la corde est vraiment tankée. Ne reste plus qu’une solution : aller la décoincer. Super… D’autant que la zone reste raide, non équipée et en rocher, disons… …moyen. Je récupère donc toutes nos sangles, fielous et autres Machard et pars, encordé, sur le brin rose. J’opte pour la rampe couloir à ma gauche qui me permet de poser des sangles sur des arbustes qui, à défaut de me retenir, me remontent au moins le moral… Ce n’est pas très dur, mais le rocher est fragile. Je finis par atteindre une plaquette de la voie voisine, puis, son relais de progression. Je poursuis ma progression encore quelques mètres jusqu’à la corde qui s’est coincée dans un becquet piégeux. Je la décoince, l’accroche à mon porte matériel puis désescalade jusqu’au relais. J’y installe un maillon et établis un petit rappel me permettant de récupérer le matériel et de rallier Agata à la vraie chaîne de rappel. Agata est rassurée, moi aussi ! Nous pouvons poursuivre plus détendus notre descente sur la corde en 2 grands rappels : 50m puis 60m (tout pile !). Pas fâchés d’être rendus sur le plancher des vaches !
La marche retour puis la bière bien méritée seront l’occasion de partager sur cette journée bien remplie. Une belle aventure avec quelques péripéties dont on se serait bien passé !